Abdelkebir Ouaddar, l'homme par qui le Maroc et la France galopent !
J’ai toujours aimé les histoires à rebondissements. Quelle histoire a plus de rebondissements que celle d’un cavalier de saut d’obstacles ?
Abdelkebir Ouaddar, ou Kebir comme il aime être surnommé, est né parmi une famille modeste à Aït Ourir, près de Marrakech. Il n’était en rien prédestiné à devenir l’un des meilleurs cavaliers du monde, qui plus est dans une discipline dominée depuis des décennies, que dis-je, depuis des lustres, par les cavaliers allemands et français. Mais voilà, une bonne étoile, comme il le dit lui-même, va placer la famille du roi Mohammed VI sur sa route. Et à l’âge de douze ans, il apprend, petit à petit, comment monter à cheval.
Il ne suffit pas de devenir excellent cavalier, comme chacun sait, pour participer aux Jeux Olympiques. Kebir a presque 50 ans, soit un âge où nombre de sportifs de haut niveau songent davantage à prendre leur retraite qu’à chercher des médailles, lorsqu’il reçoit un second cadeau royal : un petit cheval bai de race Selle français, né en Bretagne, Quickly de Kreisker. Dès lors, plus rien n’arrête ce couple (en équitation, nous parlons de couple cavalier-cheval). À tel point qu’en novembre 2013, lorsque Kebir et Quickly décrochent un premier gros concours, les masters de Stuttgart, la surprise des cavaliers et organisateurs, habitués depuis longtemps à voir l’Occident dominer les podiums, est générale. Le drapeau et l’hymne national du Maroc tardent fort à apparaître !
Des qualités humaines
Si je vous entretiens à propos de Kébir, amis lecteurs, ce n’est pas uniquement pour ses compétences sportives, pour sa révélation tardive, ni même quant aux fait de croire en sa bonne fortune et d’être là où personne ne vous attend. Mais bien pour donner la parole au principal intéressé, qui dit lui même être « né dans un drap blanc », expression populaire marocaine pour désigner la chance. Kébir est devenu l’un des cavaliers préférés du public marocain… et du public français ! Chacune de ses apparitions, ou presque, entraîne une standing ovation. Cela en grande partie par ses qualités humaines et sa générosité. Il fut le premier cavalier marocain de l’Histoire (l’histoire de l’équitation olympique couvre plus de cent années) à participer à des Jeux équestres mondiaux, en 2014, puis aux Jeux olympiques de Rio en 2016. Face à des concurrents pour ainsi dire du sérail, du moins, issus pour la plupart de dynasties de cavaliers reconnues. Kebir raconte ainsi cette étape de sa vie dans le journal L’Équipe :
J’adore donner. Par exemple, en 2014, aux Jeux équestres mondiaux à Caen, tous les concurrents étaient très concentrés, très sérieux. C’étaient des Mondiaux ! Mais moi, quand je suis entré sur la piste, j’ai pris le temps de saluer tout le monde. Après, seulement, je me suis élancé.
Kebir n’a décroché aucune médaille aux Jeux équestres mondiaux, ni deux ans plus tard, aux Jeux Olympiques de Rio, où il était porte-drapeau de la délégation marocaine. Mais il n’y a nul doute que parmi les gens qui se trouvaient ces jours là dans le public, ou les journalistes, ou devant leur télévision, nombre se souviennent qu’un cavalier né d’une famille modeste, à Aït Ourir, près de Marrakech, fut le seul à sourire et à saluer pour chaque côté des estrades avant de sauter ses obstacles ! Cette générosité, Kebir l’accorde aussi à son cheval. La plupart des cavaliers de mondiaux sanctionneraient le moindre écart de leur monture. Kébir laisseQuickly s’exprimer en décochant quelques ruades sur la piste, comme il le dit : « ça lui fait plaisir de faire ses ruades. C’est aussi sa façon de dire bonjour au public ! »
Après les mondiaux en 2014, paraît dans La Revue un article intitulé « Derrière Kebir Ouaddar, c’est tout le Maroc qui galope ». Car Kebir a suscité des vocations équestres non seulement dans son pays d’origine, mais aussi en France.
Le mot de la fin ? Souhaitons que ces jeunes cavaliers, marocains ou français, s’inspirent des qualités humaines de leur modèle !